Manuel Roret du Relieur |
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§ 17. - Achevage de la coiffe
La coiffe est une des parties les plus importantes du volume ; on doit la rendre le plus solide possible. C'est par la coiffe qu'on prend le volume pour le sortir de la bibliothèque ; l'on court le risque de la déchirer si elle ne présente pas une grande solidité, et le volume perd toute sa grâce. Dans l’état où nous l’avons laissée, elle n’est qu’à moitié faite. Pour la terminer, on prend, un petit plioir en os dont le bout est bien arrondi, quoique un peu pointu, et ne présente aucune partie tranchante. On enfonce la pointe du plioir dans les angles du dos près de la tranchefile, afin de bien appliquer les peaux l’une sur l’autre. On appuie fortement avec le même plioir sur les angles du carton, qu’on a coupés près du dos, et qu’on nomme mors du carton, afin d’y faire bien appliquer la peau dans tous les sens. On rabat ensuite la peau sur la tranchefile, en frappant doucement dessus avec le plat du plioir incliné vers soi, ce qui s’appelle coiffer la tranchefile. Cette dernière opération ne se fait plus guère aujourd’hui comme nous venons de le dire. On obtient le même résultat d’une manière plus simple. On prend le volume de la main gauche, on le pose verticalement en travers devant soi, le dos appuyé sur la table ; et de la main droite on tient le plioir en os, le même dont on vient de se servir, pourvu qu’il soit bien plat. Au lieu du plioir, il vaut mieux employer une petite règle en buis, de 5 centimètres de large et de 5 à 7 millimètres d’épaisseur, dont cette petite surface soit bien à angle droit avec sa largeur. On peut encore y suppléer par une équerre dont l’une des branches repose sur la table, par son épaisseur, tandis que l’autre est bien verticale. On présente celle branche verticale contre la coiffe, on fait basculer circulairement le volume sur son dos, en appuyant le plioir ou mieux l’équerre contre la peau. Par ce moyen, la coiffe prend une jolie forme régulière, la tranchefile se trouve bien couverte, et cette opération n’exige que quelques instants pour que la coiffe et les cartons ne forment qu’une ligne droite. On en fait autant sur la queue et avec les mêmes précautions. On place le même plioir sur les bords des cartons, afin qu’ils présentent une face bien carrée, les angles saillants et non arrondis, comme ils le seraient sans cette manipulation. On glisse, entre les deux cartons de la couverture et le volume, un morceau de papier qu’on a arraché de la couverture d’une brochure en la débrochant pour la relier. Ce papier, plus épais qu’une feuille simple, garantit le volume de l’humidité. Il ne faut pas perdre de vue que pendant toutes les opérations qui se rapportent à la couvrure, l’ouvrier doit porter la plus grande attention à tenir ses deux cartons toujours à la même hauteur l’un de l’autre. Aussitôt que le volume est arrivé à ce point, on le met à la presse entre deux ais à mettre en presse, afin de bien marquer le mors. Ces ais sont plus épais. d’un côté que de l’autre; on place l’angle du côté épais dans le mors et bien également des deux côtés du volume, de sorte qu’en serrant la presse, le volume est seulement comprimé dans ces points ; tout le reste est libre. Lorsque le mors est bien marqué, ce qui a lieu après quelques minutes, on passe un gros fil qui entoure le volume en passant dans les mors, près du dos, sur la tête et sur la queue, dans les coins de la coiffe. On arrête ce fil après avoir fait plusieurs tours ; il sert à conserver la forme que l’on a désiré donner aux angles de la coiffe. Cela fait, on ôte le volume de la presse, et on le met en pile pour le faire sécher. Pour les volumes couverts de maroquin, etc., on les met en presse en sens contraire, la gouttière en dessus, afin que les plats ne touchent pas la presse. Si le volume est couvert en veau, qui doit rester fauve, on frotte toute la couverture avec une légère dissolution d’alun. Nous devons faire à ce sujet quelques observations. Il faut, pour aluner le veau, se servir d’une éponge fine et pure. Ce genre de reliure veut être traité avec soin. Presque toutes les reliures en veau des XVe et XVIe siècles étaient fauves. Pasdeloup s’est illustré dans la teinte égale d’un jaune-brun, parfois très foncée, qu’il donnait à ses reliures, qui sont, comme on sait, fort recherchées des grands amateurs. On n’a prodigué le velours et surtout la moire qu’à la fin du XVIIIe siècle. Ce n’est pas que, bien employée, bien dorée, la moire ne produise un très joli effet. On double rarement un livre de moire, sans y mettre des charnières (ou mors) pareilles au cuir qui couvre le livre. Lorsqu’ils en sont dépourvus, ces livres restent presque toujours raides dans les mors, parce que, pour être employée proprement, la moire doit être collée sur un papier mince, et que cette double épaisseur de papier et de moire rend les mors un peu grossiers. |
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