Manuel Roret du Relieur

 
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Préface

Première partie - Brochage

Deuxième partie - Reliure

Considérations générales

Chapitre 1
Matières employées par le relieur


Chapitre 2
Atelier et outillage du relieur


Chapitre 3
Opérations du relieur

  1ère section - Reliure pleine
   § 1. - Débrochage
   § 2. - Collationnement
   § 3. - Battage
   § 4. - Grecquage
   § 5. - Cousage
   § 6. - Endossage
   § 7. - Rognure
   § 8. - Faire la tranche
   § 9. - Tranchefile
   § 10. - Rabaissure
   § 11. - Coupage des coins
   § 12. - Collage de la carte
   § 13. - Collage des coins
   § 14. - Coupage et parage des peaux
   § 15. - Couvrure
   § 16. - Collage des angles
   § 17. - Achevage de la coiffe
   § 18. - Fouettage et défouettage
   § 19. - Mise en place des pièces blanches
   § 20. - Battage des plats
   § 21. - Pose des pièces de titre
   § 22. - Dorure
   § 23. - Brunissage de la tranche
   § 24. - Collage de la garde
   § 25. - Polissure
   § 26. - Vernissage
  2ème section - Demi-reliure
  3ème section - Cartonnages

Chapitre 4
Racinage et marbrure de la couverture


Chapitre 5
Marbrure sur tranche


Chapitre 6
Dorure et gaufrure


Chapitre 7
Reliure mécanique


Chapitre 8
Reliures diverses


Chapitre 9
Renseignements divers


 

 
§ 14. - Coupage et parage des peaux

1. Coupage des peaux


La manière de couper les peaux est une opération importante ; le relieur peut faire d'assez grandes économies lorsqu'il sait bien s'y prendre. Il a ordinairement des patrons pour tous les formats ; ces patrons sont en carton, et ils ont une étendue de 3 centimètres tout autour plus grande que celle du volume tout ouvert.

On ne doit jamais tremper la basane ou le veau avant de les employer ; au moment de les travailler, il suffit de les humecter légèrement avec de l’eau bien claire. On les plie ordinairement en deux, fleur contre fleur, afin que celles-ci ne soient ni altérées, ni salies, puis on les place entre des cartons épais, qu’on pose sur une table bien plane et que l’on charge de poids, afin de les bien sécher. C’est alors qu’on tire dans tous les sens les peaux ainsi assouplies, afin de les étendre et d’effacer les plis qui pourraient s’être formés. On termine l’opération en les découpant au moyen de patrons.

Lorsque le veau doit rester fauve ou d’une couleur unie, on le coupe à sec et on le passe rapidement dans un plat avec de l’eau bien claire ; on le plie en deux, fleur contre fleur : on ne le tord pas. On doit employer cette peau le plus promptement possible et surtout, pour éviter les taches, en éloigner tous les objets en fer, qui la rendraient défectueuse.

Le maroquin, le mouton maroquiné et le chagrin ne se trempent pas ; on détruirait le grain, et ils se tacheraient.

Les peaux préparées pour la reliure sont apprêtées exprès ; elles sont minces et d’égale épaisseur partout ; elles sont drayées, comme disent les ouvriers.

Si l’on a des patrons, on les présente sur la peau, et on les tourne dans tous les sens pour tirer de celle-ci le plus grand nombre de morceaux, soit pour le même format, soit pour des formats plus petits. De cette manière, l’on met tout à profit, soit pour les dos des demi-reliures, soit pour les coins.

Quand on n’a pas de patron, on prend le livre par la gouttière, on laisse tomber les cartons sur la peau, en appuyant le dos, et avec un couteau de bois on marque tout autour sur la peau, à 2 centimètres et demi de distance du livre : on coupe selon cette marque. On plie chaque morceau en deux, fleur contre fleur, afin qu’ils conservent leur humidité, et on les entasse les uns sur les autres pour les parer ensemble.

2. Parage des peaux

Le maroquin, avons-nous dit, ne doit pas être mouillé. Avant de le parer, on se contente de le bien étendre, la fleur en dessus. On ne le marque pas non plus avec le plioir, pour le couper, mais avec de la craie. Enfin, pour le parer, on mouille les bouts des doigts avec de la salive, et l’on roule les bords de la peau en les prenant successivement du côté de la chair. On parvient ainsi à les ramollir et alors le couteau à parer prend beaucoup mieux.

On pare les peaux sur la pierre à parer avec le paroir ; on les ponce de temps en temps jusqu’à ce que la surface soit devenue bien douce et qu’il n’y existe plus aucun grain qui puisse arrêter le couteau à parer. Alors on les laisse sécher complètement. On doit éviter de graisser la pierre avec de l’huile, ce qui constitue un danger permanent pour la peau.

Le couteau doit être bien affilé, et pour entretenir son tranchant, les ouvriers le passent de temps en temps sur leur pierre. Toutefois, leur but, en le passant sur la pierre, n’est pas tant de l’affiler, que de faire passer le morfil de l’acier du côté de la lame qui touche le cuir, et qui la fait mordre davantage. Par le travail, ce morfil se rejette en dessus, et en le passant sur la pierre, on le fait revenir en dessous, ce qui le fait mieux couper.

On étend la peau sur le bord de la pierre, du côté de la fleur, et avec le couteau on enlève de l’épaisseur de la peau, du côté de la chair, en prenant un peu diagonalement à partir de 3 à 5 centimètres du bord, et en allant en mourant jusqu’au bord.

Il faut avoir soin de tenir bien tendue la peau de la main gauche, et de ne pas élever ou trop abaisser la main droite qui tient le couteau à parer. Si cette dernière main était trop élevée, on couperait la peau avant d’être arrivé au bord ; si elle était trop abaissée, on ne couperait pas : il faut un juste milieu, et l’habitude rend bientôt maître.

Toutes les peaux se parent de la même manière. On les plie en deux, fleur contre fleur, au fur et à mesure qu’on les pare, et on les entasse afin qu’elles conservent leur humidité.

Le maroquin est un peu plus difficile à parer, parce qu’il n’est pas mouillé, et il demande une main plus exercée. Il est quelquefois si coriace sur les bords, qu’on est obligé, pour le parer, de le mouiller légèrement avec une éponge humide. Alors, en agissant avec précaution, il n’y a plus de ces duretés que les relieurs attribuent à tort au cylindre.

Le relieur n’emploie aucune peau qu’il ne l’ait parée, afin de faire disparaître les épaisseurs sur les bords. Le but de la parure est, en effet, d’amincir la peau en partant, comme on l’a vu, de 3 à 5 centimèt. du bord, et réduisant insensiblement l’épaisseur jusqu’à, ce qu’il ne reste que l’épiderme sur le bord. Il faut que chaque coup de couteau enlève une épaisseur égale de peau, afin que celle-ci ne présente ni creux ni bosses. Il faut aussi nettoyer de temps en temps la pierre et la peau, de manière qu’il ne s’introduise entre les deux aucun corps étranger, qui, faisant paraître la peau plus épaisse en apparence sur ces points, rendrait l’opération défectueuse.

Si l’on aperçoit un défaut dans la peau, on doit éviter d’employer cette partie, mais si la chose n’est pas possible, ou que l’accident soit arrivé depuis qu’elle a été taillée, le bon goût indique assez qu’il ne faut pas s’en servir, à moins qu’on ne parvienne à masquer tellement bien ce défaut qu’on ne puisse pas l’apercevoir. Par exemple, si ce défaut se rencontrait sur le dos, il faudrait tourner la peau de manière qu’il pût se trouver placé sous la pièce du titre, qui le couvrirait parfaitement, soit sur une autre place, où l’on mettrait beaucoup de dorure qui le masquerait. S’il devait se rencontrer sur le plat, ce qui serait toujours très vilain, il faudrait au moins tourner la peau de manière à placer ce défaut sur la surface de derrière, et tâcher de le cacher, autant que possible, par de la dorure, ou du moins par de la gaufrure. Le bon goût du relieur doit présider à tout cela, et il ferait mieux de faire le sacrifice des morceaux défectueux.






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