Art de faire le papier |
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Autre forme de moulins, qui a été proposée
174. Le principal inconvénient de la machine que nous venons de décrire, a toujours consisté dans la manière d'éloigner le cylindre ou de le rapprocher de la platine. Il est évident en effet, que comme l'une de ses extrémités est terminée par un pignon sur lequel passe le rouet destiné à le mouvoir, on ne saurait élever cette partie ; on se contente donc de soulever le pivot qui est le plus près du cylindre : dès-lors le cylindre n'est plus parallèle à la platine ; il en est plus près environ d'un tiers à l'une de ses extrémités qu'à l'autre. Nous avons indiqué (§. 152) un moyen assez simple d'y obvier ; mais M. de Genssane, actuellement concessionnaire des mines de Franche-Comté, et correspondant de l'Académie, avait entrepris de le faire en donnant une toute autre forme à ses moulins : nous allons en donner une idée ; cependant, comme elle n'a point été employée, on ne saurait garantir ses avantages ; ce serait à l'expérience à les constater. 175. Il y a environ trente ans que M. J. B. de Méan, ingénieur, qui avait vu les moulins à papier de Serdam, en fit construire plusieurs dans le même goût, c'est-à-dire avec des cylindres, à Arras, à Dinan, dans le pays de Liège, à Huy et à Dalem. Ce fut lui qui en communiqua la méthode à M. de Genssane, qui non-seulement les fit connaître en France, mais qui, d'après les premiers documens, travailla à les perfectionner. Il parvint en effet à leur donner la disposition dont nous allons parler, et dont il présenta le projet à 1'Académie le deuxième août 1737. L'auge de M. de Genssane n'a aucune cloison, comme celle de la machine hollandaise ; de sorte que le mouvement des chiffons y est plus libre et l'agitation plus forte, à raison d'un moindre obstacle. Le cône de M. de Genssane brise la matière sur deux plans inclinés, posés de chaque côté du cône ; et par conséquent chaque point de la circonférence du cône agit deux fois à chaque tour une fois sur chaque plan : ainsi cette machine paraît faire le double du travail de la machine hollandaise, qui n'a qu'une seule platine. Le cône de M. de Genssane s'élève verticalement et parallèlement. Dès-lors la surface du cône est toujours parallèle aux plans des deux platines, et agit uniformément ; au lieu que dans la machine à cylindre de la construction actuelle, on n'élève qu'une des extrémités du cylindre, qui dès-lors n'est plus parallèle à la platine, si ce n'est dans une seule position. 176. La cuve est semblable à celle dont nous avons parlé à l'occasion du cylindre (§. 119) ; un cône, dont l'axe est vertical, également armé de fer, est posé horisontalement au centre de la cuve ; deux platines de fer, de cuivre, ou de métal plus dur, sillonnées dans leur longueur, sont placées à côté du cône. Ces deux platines sont inclinées de façon qu'elles soient parallèles aux côtés du cône, soit qu'on éloigne ou qu'on approche le cône des platines. 177. Le pivot inférieur est placé dans une crapaudine pratiquée au fond de la cuve, et qui est à l'extrémité d'un levier. Ce levier mobile autour d'un point communique par le moyen d'une charnière, à une autre barre de fer, placée verticalement, et dont l'extrémité supérieure est hors de la cuve. Un écrou placé à cette extrémité sert à enfoncer dans la cuve l'extrémité du levier, à faire monter la crapaudine, et par conséquent le cône. Dans cette position l'espace qu'il y a entre le cône et les platines est beaucoup plus considérable que dans l'autre cuve, où le cône touche presque aux platines de chaque côté, parce que l'extrémité du levier est relevée, ce qui fait descendre la crapaudine jusques sur le fond de la boîte, et la circonférence du cône jusques sur la surface des platines. 178. Pour faire agir cette machine, il suffit de poser sur l'axe du cône une lanterne, dans laquelle engrène un rouet, qui, partant de la roue à aubes, communiquera son mouvement à toute la machine. Le rouet pourrait être porté sur le même axe que la grande roue, pourvu qu'il fut fort grand et fort nombré ; mais il vaut encore mieux, pour augmenter la vîtesse du cylindre, qu'il y ait un axe de renvoi, et que le rouet de la roue à aubes agissant sur un pignon adossé à une roue, cette dernière roue fasse mouvoir la lanterne, qui par ce moyen ira beaucoup plus vite. 179. Lorsqu'au moyen de l'écrou, on aura élevé le cône d'un ou deux pouces, l'engrenage de la lanterne n'en sera pas plus fort, elle sera seulement prise un peu plus bas par le rouet. 180. Si l'on descend le cône de cette nouvelle machine jusqu'à ce qu'il touche presque les deux platines, il pourra arriver que la matière soit réduite à perdre sa consistance ; et c'est un des défauts de la fabrique hollandaise, d'où naît l'inconvénient d'avoir un papier qui se coupe dès qu'on le plie ou qu'on le fatigue avec quelque instrument. 181. Il pourrait être utile de ne pas laisser la matière sous le cône que l'on vient de décrire, jusqu'à la fin de l'opération, mais de la faire passer sous un cône garni de bandes de fer, qui seraient piquées de la même manière que les râpes à bois, avec des platines également piquées. Alors, dit M. de Genssane, ayant fixé la distance entre le cône et les platines au plus bas point possible, sans que les deux surfaces se touchent, il arrivera que la matière sera parfaitement déchirée, sans qu'elle soit coupée. Car les pointes de la surface du cône ayant accroché et entraîné les parties de chiffons, elles ne peuvent manquer d'être arrêtées, déchirées, et comme cardées par les pointes de la platine, qui en sont tout proche. 182. La forme conique substituée par M. de Genssane à celle des cylindres, entraîne cependant un inconvénient : la vîtesse des parties inférieures du cône est beaucoup moindre que celle des parties supérieures ; et le chiffon se précipitant toujours en bas par son propre poids, peut s'y présenter souvent en plus grande quantité que dans les parties qui ont plus de vitesse : ce qui rendra l'opération fort inégale. 183. Après avoir parlé des cylindres, et de la manière dont M. de Genssane a entrepris d'en corriger les inconvéniens, c'est ici le lieu de parler du moyen qu'il proposa aussi d'employer, à la place du dérompoir, pour couper le chiffon au sortir du pourrissage avec plus d'aisance et plus d'égalité : c'est la machine que nous avons annoncée ci-dessus. 184. Nous supposons (planche VI, fig. 6), une cuve TT, de cinq ou six pieds, dans la forme de celles où agissent les cylindres, capable de contenir de l'eau avec une quantité de chiffons sortans du pourrjssoir. Elle est divisée dans le milieu, ou à peu près, par une planche VV dont les extrémités laissent entre elles et celles de la boîte un espace TV, aussi grand à peu près que l'espace VY, qui est entre la planche et les côtés de la boîte ; l'un des côtés de la cuve est occupé par un plan incliné VY, formé d'une seule pièce de bois solide, et représentée séparément en uy (fig. 7). Ce plan incliné est garni de plusieurs tranchets a, b, c, d, semblables, pour ainsi dire, à ceux dont se servent les cordonniers. 185. Au-dessus de ces tranchets est adapté un cylindre, dont le profil est en ZZ (fig. 8), la coupe en zz (fig. 9). Les arêtes de ce cylindre sont interrompues et divisées transversalement par des cannelures ou entailles profondes fff, placées de manière que le cylindre venant à tourner, les tranchets a, b, c, d, engrènent exactement dans ces entailles : on a marqué par un cercle ponctué sur le plan zz, la profondeur qu'elles doivent avoir. Le cylindre gg (fig. 10) porte, aussi bien que les autres cylindres, une lanterne en m, par laquelle il reçoit le mouvement de la roue à aubes, qui est mue parle courant de l'eau : ce cylindre doit avoir moins de vîtesse que les autres ; les chiffons ne font presque qu'y passer ; et dès la première fois ils sont assez coupés pour pouvoir être portés sous les cylindres éfilocheurs.
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