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Le papier arabe ou papier islamique FABRICATION DE FACSIMILE DE PAPIER ARABO-ANDALOUS du XIIème au XVème siècle

Le papier arabe ou papier islamique FABRICATION DE FACSIMILE DE PAPIER ARABO-ANDALOUS du XIIème au XVème siècleL'étude des papiers Arabes ou Islamiques que l'on trouve dans la partie du monde occupée par L'Islam à partir de 750 et qui s'étend de Samarcande à l'Est aux Pyrénées à l'Ouest est extrêmement complexe. Non seulement elle recouvre un immense espace géographique, mais, suivant l'évolution géopolitique, elle est perpétuellement mouvante dans ses implantations et ses influences, et diversifiée dans ses modes et techniques de production.

On trouve à la fois des techniques qui font appel à la forme flottée, à la forme plongée à tamis souple (en jonc ou en graminées dures) et indépendant de son châssis et plus tard sans doute aux tamis métalliques importés d’occident (voir photos). A cela vient s’ajouter dès le quinzième siècle l’arabisation ou l’islamisation de papiers occidentaux, principalement Italiens pendant deux siècles. (Dépose d’une couche d’amidon polie sur chacune des faces de la feuille pour la rendre propre à l’utilisation du calame).

Chacun sait aujourd’hui qu'en occupant Samarcande en 751, les Arabes ont découvert les fabriques de papier chinois et leurs artisans.

La péninsule Arabe connaissait le papier avant d’en entreprendre la fabrication. Si en apparence elle l’utilisait peu c’est qu’il semblait peu adapté aux techniques d’écriture en usage au Moyen-Orient et que les besoins en support graphiques de communication étaient remplis par le papyrus depuis plus de 3000 ans et par le parchemin depuis 900 ans.

Le contrôle de la fabrication a permis la création de ces nouveaux papiers qu’on nomme papiers Arabes ou Islamiques.

Parmi ces papiers, celui qui est fabriqué du XIè au XIIIè siècle en Espagne avant l’apparition du papier Italien est relativement bien connu et correspond à une fabrication assez homogène.

Il nous a paru intéressant de tenter d'en produire un fac-similé.

Tissage du tamisLa réalisation d’une forme par Jean-Louis ESTEVE (professeur à l’ECOLE ESTIENNE) nous a permis d’entreprendre ce travail.

La forme est essentielle car c’est elle qui, combinée avec une fabrication de pâte à papier appropriée, va donner au papier sa structure et son esthétique.

Jean-Louis ESTEVE, après une étude approfondie de manuscrits Arabo-Andalous de la Bibliothèque Nationale, a réalisé à partir de joncs liés par une chaînette de soie un tamis souple (voir photographie) permettant de former une feuille tout à fait semblable à celles que l’on peut observer dans les papiers de la période qui nous intéresse. Le châssis de ce tamis, en bois de cêdre réputé imputrescible est la copie de châssis encore utilisés en Asie Centrale, dans le nord de l’Inde et au Pakistan (voir photo).

Une fois le tamis obtenu, reste à préparer une pâte permettant de réaliser un papier acceptable.

Nous savons que les papiers de cette période sont essentiellement composés de fibres de lin et de chanvre récupérées à partir de toiles , de cordages ou de voiles usées, de vieux filets de pêche, etc... Compte tenu des moyens mécaniques relativement faibles utilisés pour battre ces matières en pâte, un processus de fermentation éventuellement accéléré par l’emploi de chaux était sans doute utilisé. Cette opération attendrissait considérablement le matériau et permettait son broyage et sa dispersion dans de meilleures conditions. Dans les régions où ce papier était fabriqué, il est vraisemblable qu’on utilisait ensuite une meule en pierre mue par la force animale qui roulait les matériaux dans une auge circulaire en les écrasant.

Levage de la feuille de papierNous ne disposons pas du matériel et la fermentation est trop complexe à mettre en oeuvre pour une situation qui reste expérimentale, même si elle débouche sur la production de quelques centaines de feuilles.

Par contre, il est très facile de produire, avec une pile hollandaise de laboratoire, quelques kilogrammes de pâte de chiffons usés de lin et de chanvre, tout à fait semblable dans sa structure à celle des pâtes utilisées à cette époque. Il suffit pour cela de conduire la fabrication de la pâte à cet effet et les réglages dont on dispose sur ce genre de machine le permettent parfaitement.

La pâte obtenue, les feuilles sont fabriquées exactement comme se fabriquent tous les papiers à l'aide d’une forme plongée.

Une fois la feuille égouttée sur le tamis se pose le problème du couchage. Couchage de la feuille de papierNous n’avons aucun document réellement fiable sur la méthode employée. Il semblerait que cela nous amène à résoudre un point historique important sur l’emploi des intercalaires qui permettent de superposer puis de presser des feuilles humides sans qu’elles ne se collent comme dans un carton. Si on adopte les méthodes d’Extrême-Orient, on doit superposer les feuilles mouillées (environ 90% d’eau) ce qui avec une pâte de lin ou chanvre s’avère parfaitement impossible. Expliquer pourquoi cela marche sur des papiers Orientaux serait trop long ici et reste l’objet de trop de controverses pour être traité en quelques lignes.

Couchage de la feuille de papierIl semblerait donc que, à moins de disposer de suffisamment de planchette de bois pour pouvoir faire sécher chaque feuille une à une après le couchage, ce qui de toute façon éliminerait un pressage impossible entre deux surfaces dures, les papetiers de la péninsule Ibèrique aient disposé d’intercalaires que nous nommons feutres en papeterie occidentale. Cela semble probable d’autant que l’aspect des feuilles finies apparaît peu compatible avec une autre méthode. J’insiste sur l’importance que prend la matière première dans ce raisonnement. Si l’on dispose d’autres matériaux comme ceux qui sont utilisés en orient et en extrême orient, le problème n’est plus du tout le même, le résultat non plus d’ailleurs.

Qu’elles soient à contrepoids, à vis ou à corde, les presses étaient connues et suffisantes pour développer les 4 ou 5 tonnes nécessaires à un bon égouttage pour des feuilles de ce format. Les intercalaires permettent la pressée en maintenant la cohérence des feuilles pendant le drainage de l’eau excédentaire Nous utilisons comme intercalaires des non-tissés très fins. Le papier est pressé à l’équivalent de 5 tonnes. (La surface pressée fait un peu plus qu’un cinquième de mètre carré).

Une fois pressées, les feuilles étaient couramment séchées appliquées sur des murs lisses.(N’oublions pas que toutes ces opérations étaient réalisées sous un climat nettement plus chaud et plus sec que le nôtre.) Nous, nous les suspendons dans des pinces comme nos papiers habituels.

Les feuilles ainsi obtenues doivent ensuite être amidonnées puis polies.

L’amidonnage peut se faire à partir d’amidon de blé ou de riz. L’amidon est préparé exactement comme la colle utilisée traditionnellement en reliure, appliqué sur les feuilles à l’aide d’une spatule et lissé de la paume de la main.

Après de nombreux tâtonnements, (colles trop diluées) nous l’utilisons à sa concentration de fabrication, soit un volume d’amidon pour quatre volumes d’eau. L’opération se fait en deux temps : le recto, puis le verso une fois que le recto a été séché.

La quantité d’amidon utilisé représente une trentaine de gramme par mètre carré de papier traité. Cela fait varier considérablement le grammage du papier. Dans le cas du papier produit cela l’a fait passer de 100 à 130 grammes au mètre carré. Cette augmentation de grammage est proportionnellement plus ou moins importante suivant que le papier est fort ou léger, la quantité d’amidon nécessaire étant conditionnée plus par la surface de la feuille que par son poids.

Il faut enfin polir la feuille. N’importe quelle surface dure peut servir de polissoir. Le meilleur résultat a été obtenu avec une agate de 20mm sur un papier pas trop sec. L’humidité naturelle du moulin ou ce papier a été fabriqué convient parfaitement.

Rien ne nous permet d’affirmer avec certitude que les papiers que nous imitons étaient réalisés dans des conditions identiques. Cependant le résultat obtenu ressemble, vieillissement mis à part, à s’y méprendre à nombre de papiers que nous avons examinés.

Jacques Bréjoux - Décembre 2001


 
 
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