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Les greffes de papier
De très nombreux ouvrages anciens ont subi les outrages du temps. Les conditions de stockage, les manipulations, les incendies, les innondations, les rongeurs, les insectes, les moisissures et l'usure naturelle de certains papiers fabriqués avec moins de soins que d'autres occasionnent parfois d'importantes lacunes. On peut combler ces lacunes en doublant la feuille avec un papier japonais très léger ou à l'aide d'une machine, réaliser une greffe de pâte à papier.
Dans le cas d'un livre ou d'un manuscrit, le doublage présente le double inconvénient d'altérer la lecture d'une des deux faces de la feuille et d'en augmenter l'épaisseur, rendant impossible le réemploi de la reliure d'origine ce qui en restauration est pour le moins fâcheux. La machine à combler permet de palier cet inconvénient. Mais pour qu'une greffe soit bonne il faut autant que faire se peut qu'il y ait parfaite compatibilité entre le support et le greffon. Spécialisé depuis plusieurs années dans la fabrication de papiers de linges anciens, matière première de tous les papiers jusqu'au début du XIXe siècle, nous avons eu l'idée d'adapter nos techniques de fabrication à la réalisation de greffes dont nous vous présentons deux exemples. Dans les deux cas la différence de couleur entre le greffon et le porteur est volontaire encore qu'elle ait été accentuée par le scanner dans l'échantillon ci-dessus. Ce système permet de greffer du papier vergé avec un greffon vergé même s'il est difficile de faire correspondre vergeures et surtout chainettes aux chainettes du support. La pâte est aussi proche que possible de celle de l'original en qualité et longueur de fibre. L'épair est toujours plus important dans le greffon qui lui n'a été ni jauni par le vieillissement ni opacifié par les manipulations. Le passage en presse de l'ensemble, comme pour une fabrication de papier normal, évite un doublage. La cohésion est ainsi bien meilleure que celle obtenue avec une machine à combler d'autant que la pâte de chiffons de lin y contribue largement. Dans tous les cas de figure, le choix de la matière première est essentiel. L'échantillon ci dessus nous permet de revenir sur le phénomène de l'ombre décalée, on y distingue nettement le déport sur la droite des chaînettes de l'ombre du pontuseau dont on devine l'emplacement exact à une légère trace claire qui provient d'un dépôt de pâte entre le tamis et le pontuseau provoquant un défaut d'égouttage. Dans ce cas le tamis est simplement tendu sur son châssis et les pontuseaux le portent sans couture. Jacques Bréjoux
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